Article tiré du Monde
Exoplanètes en ligne de mire
LE MONDE | 30.10.09 | 15h46
C'est une jolie revanche, pour le minisatellite chasseur d'exoplanètes Corot. Sa carrière, qui devait s'achever à la fin de l'année, sera prolongée de trois ans. Ainsi vient d'en décider le Centre national d'études spatiales (CNES), en accord avec ses partenaires français (CNRS-INSU, Observatoire de Paris) et internationaux (Allemagne, Autriche, Belgique, Brésil, Espagne et Agence spatiale européenne). "Les résultats scientifiques déjà obtenus sont si importants que l'extension de la mission s'est imposée comme une évidence", souligne le CNES. Pour preuve, la revue Astronomy & Astrophysics leur consacre ce mois-ci un numéro spécial réunissant une cinquantaine de contributions scientifiques.
Corot avait pourtant failli... ne jamais quitter le sol. Il a fallu la mobilisation de la communauté des astronomes et des astrophysiciens pour que l'instrument, imaginé voilà quinze ans, échappe, à la fin des années 1990, aux coupes budgétaires imposées par le ministère aux programmes spatiaux. Et qu'il soit finalement lancé, en 2006, à 900 km d'altitude, sur une orbite polaire d'où il pointe sans relâche son télescope et sa caméra de très haute précision vers la voûte céleste.
Conçu à l'origine pour analyser les mouvements sismiques des étoiles (l'astérosismologie), ce minisatellite s'est vu adjoindre une seconde tâche, la détection de planètes extérieures à notre système solaire, qui lui vaut ses plus beaux succès. Comme l'observation, annoncée en février 2009, de la plus petite exoplanète - et la seule de consistance rocheuse comme la Terre - connue à ce jour.
D'un diamètre de 1,8 fois celui de notre planète et à peine cinq fois plus massive, Corot-7b, située à quelque 500 années-lumière de notre globe, est de la taille des "super-Terre" habitables que les astronomes rêvent de découvrir. Loin des géantes gazeuses surchauffées - les "Jupiter chaudes" - qui constituent la plupart des 400 exoplanètes découvertes jusqu'à présent. Las, trop proche de son soleil, dont elle fait le tour en 20 heures, Corot-7b est une fournaise de 1 500 à 2 000 °C impropre à la vie.
A son tableau de chasse, Corot a inscrit six autres planètes extrasolaires. Plusieurs autres candidates sont en phase de validation. La moisson peut paraître modeste. C'est qu'entre le moment où le satellite repère une possible exoplanète, par la variation ténue de luminosité que provoque son passage devant son étoile (transit), et celui où les télescopes au sol confirment son existence, par l'infime décalage périodique de la position de cette étoile (vitesse radiale), "il y a un long travail de vérification à faire", explique Fabienne Casoli, responsable du programme Etude et exploration de l'Univers au CNES.
Sentinelle de l'espace
"Durant ses trois premières années de fonctionnement, Corot a montré que les planètes extrasolaires sont d'une grande diversité, commente la chercheuse. Les trois prochaines devraient multiplier les données sur la nature, la taille ou la densité de ces corps célestes. Nous avons bon espoir de trouver des planètes rocheuses, peu massives et à bonne distance de leur étoile, qui ressemblent d'assez près à notre Terre".
Moins médiatiques, les résultats obtenus en physique stellaire n'en ouvrent pas moins de nouvelles fenêtres sur l'évolution de l'Univers. Pour tenter de comprendre le fonctionnement des étoiles, les astrophysiciens doivent sonder leurs entrailles, leur coeur brûlant où se produisent les réactions thermonucléaires dont l'énergie est transportée, du centre vers l'extérieur, par déplacement de matière (convection) ou transfert thermique (conduction). Les seuls indices dont ils disposent sont les vibrations de surface, qui se manifestent par de petites variations de luminosité. Dans ce domaine, Corot a fait apparaître, en scrutant des astres similaires à notre Soleil et d'autres très différents, comme des géantes rouges proches de leur fin de vie, que "la plupart des étoiles sont beaucoup plus variables qu'on ne l'attendait".
Corot n'est plus la seule sentinelle de l'espace à guetter d'autres Terre. En mars a été lancé le télescope Kepler de la NASA. Et, avec le projet Planetary Transits and Oscillations of stars (Plato), l'Agence spatiale européenne prépare déjà, pour la fin de la prochaine décennie, la relève.
Pierre Le Hir
lundi 16 novembre 2009
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